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Secteur bancaire

Tokyo centre financier du Japon
Tokyo centre financier du Japon

Consolidation de la situation du système bancaire

_ La situation du système bancaire japonais a continué de s’améliorer en 2006. Le redressement de l’économie japonaise ainsi que les restructurations importantes effectuées par les banques depuis plusieurs années ont contribué à mettre définitivement un terme aux difficultés structurelles auxquelles étaient confrontés les établissements au début des années 2000. La situation financière des grandes banques est sur le point d’être normalisée : les résultats se sont redressés, les créances douteuses ont été largement apurées et le remboursement des fonds publics s’est accéléré. Même si la situation de certaines banques locales reste problématique, le risque systémique a disparu.
Cependant, malgré les efforts réalisés pour développer de nouvelles activités, les banques éprouvent des difficultés pour améliorer durablement leur rentabilité dans un contexte de concurrence exacerbé dans le secteur financier.

Restructuration des acteurs bancaires

_ Depuis 2001, les principales banques généralistes japonaises se sont engagées dans un processus de regroupement en trois grands groupes bancaires multi-métiers d’envergure internationale, appelés « city banks » :
– Mitsubishi UFJ Financial Group (MUFG), né de la fusion, en 2005, de United Financial of Japan (UFJ) et de Mitsubishi Tokyo Financial Group (MTFG), détient notamment la Bank of Tokyo Mitsubishi UFJ, Mitsubishi UFJ Trust and Banking et Mitsubishi UFJ
Securities. Par son total de bilan, MUFJ est le plus grand groupe bancaire mondial.
– Mizuho Financial Group rassemble, sous une société holding, Mizuho Bank (banque de détail), Mizuho Corporate Bank (banque de financement des grandes entreprises), Mizuho Securities (maison de titres) et Mizuho Trust & Banking (banque de gestion d’actifs) ;
– Sumitomo Mitsui Financial Group (SMFG) comprend notamment la SMBC (Sumitomo Mitsui Banking Corporation), issue de la fusion des banques Sumitomo et Sakura, et la maison de titres Daiwa
Securities SMBC. Après l’échec de sa tentative de prise de contrôle de UFJ, SMFG est à la recherche d’une nouvelle stratégie de développement.
La réorganisation du groupe Resona est effective depuis le 1er trimestre 2003, à l’issue de l’intégration de Asahi Bank et de Daiwa Bank dans de nouvelles structures (Resona Bank et Saitama Resona Bank). Le groupe Resona, qui était jusqu’alors le plus fragile des grands groupes bancaires japonais, s’était recentré sur le marché domestique, notamment le financement des PME dans la région du Kansai (Osaka). Devenu sous-capitalisé à la suite d’une « opération-vérité » menée début 2003, il a reçu une aide massive de l’Etat en juillet 2003 (1 960 milliards de yens) et a entrepris une restructuration drastique. Parmi les grandes banques figurent également deux établissements indépendants au statut de trust banks (Sumitomo Trust et Mitsui Trust).

_ Au 31 mars 2006, le secteur bancaire japonais comprenait une composante locale importante, avec 112 banques régionales (Bank of Yokohama, Chiba Bank, etc.) et 480 banques de dépôts à statut spécial organisées en réseaux de type coopératif (shinkin banks, credit cooperatives, non comprises les centaines de coopératives des secteurs agricole et de la pêche) et fédérées par des organes centraux (Shinkin Central Bank, Norinchukin Bank). Les banques locales reçoivent un volume substantiel de dépôts et assurent une part majoritaire du financement (respectivement environ 40 % et 45 % du total de l’ensemble du secteur financier), notamment vers les PME. Le secteur bancaire local s’est recomposé essentiellement sous la forme de fusions internes au sein des réseaux, plus rarement d’absorption de petites banques régionales par des concurrentes plus importantes, et exceptionnellement par des opérations impliquant des intérêts étrangers.

_ Un certain nombre de sociétés financières spécialisées exercent une activité au Japon. Longtemps autonomes, elles opèrent actuellement souvent au sein des grands groupes bancaires. Le secteur du crédit à la consommation, qui avait longtemps été délaissé par les banques généralistes compte tenu des réticences traditionnelles des ménages japonais à s’endetter, a suscité un regain d’intérêt depuis début 2004 : les grandes banques souhaitant renforcer l’activité de banque de détail, aux marges plus élevées, elles ont noué des partenariats avec la plupart des grands intervenants spécialisés (Acom, Promise, Orient, Takefuji…) et des sociétés de cartes de crédit.

_ Le secteur financier public joue également un rôle important dans le paysage bancaire japonais, au travers d’institutions intervenant dans les domaines de la collecte de l’épargne, des prêts aux PME, du financement de l’habitat et du soutien de grands projets : Japan Post, Development Bank of Japan, Government Housing Loan Corporation, Japan Bank for International Cooperation… Ces établissements disposent de parts de marchés significatives et de conditions statutaires préférentielles (garanties, exonérations fiscales). Le gouvernement Koizumi a placé la réforme des institutions financières publiques, et notamment de Japan Post, au premier rang de ses priorités depuis 2001. La Diète a adopté, en octobre 2005, la loi sur la privatisation de Japan Post qui devrait débuter en octobre 2007 pour s’achever en septembre 2017.

Les réformes structurelles engagées dans les banques

_ Les réformes structurelles dans le secteur bancaire ont pris de l’ampleur à partir de 1998. Des injections de fonds publics en capital ou quasi-capital ont été effectuées massivement dans les principaux établissements en 1998, 1999 et 2003, sous conditions de remboursement et de développement des prêts aux PME, pour compenser les pertes. Le plan Takenaka (du nom de l’ancien ministre des services financiers), lancé en octobre 2002, a constitué une étape décisive pour accélérer les restructurations bancaires, mais a été limité aux seules grandes banques. Ce plan préconisait, d’ici le 31 mars 2005, de :
– diminuer de moitié le taux de créances douteuses des grandes banques par rapport à son niveau de fin mars 2002 ;
– réduire les participations croisées en ramenant le portefeuille d’actions détenues par les grandes banques à un niveau inférieur à leurs fonds propres de base ;
– renforcer la rentabilité d’exploitation des banques ayant reçu des injections de fonds publics.
A l’échéance du plan, le 31 mars 2005, le 1er objectif a été atteint par l’ensemble des grands groupes, qui ont ramené leur taux de créances douteuses à 2,9 % (pour un objectif de 4,2 %). Mais le 2ème ne l’est pas complètement et le 3ème demeure problématique.

_ Le secteur bancaire local demeure assujetti à une contrainte « allégée » de la part des autorités japonaises en raison de l’impact jugé indésirable qu’aurait une restructuration trop drastique des banques locales sur le tissu économique régional, notamment les PME. La FSA n’a ainsi pas fixé d’objectif chiffré d’apurement des créances douteuses aux banques locales, ne mène pas d’inspections spéciales et admet une valorisation plus pragmatique des engagements sur la clientèle, tout en maintenant l’exigence d’un ratio de solvabilité réglementaire de 4 % seulement pour ces établissements. Cette politique, maintenue par les autorités japonaises, contribue au maintien d’une valorisation imparfaite des risques bancaires au regard des standards internationaux et entretient une distorsion de concurrence sur les marchés bancaires locaux.

_ Les pouvoirs publics interviennent désormais de façon sélective en cas de difficultés des établissements. Le dispositif d’injection de fonds publics en vigueur devrait être sollicité d’avantage en 2006 qu’il ne l’a été en 2004 et 2005. Deux banques locales (Howa et Kio) ont demandé, en avril et août 2006, au FSA de bénéficier de la loi de juin 2004 permettant des interventions préventives de recapitalisation auprès des banques régionales.

_ Les banques japonaises ont d’elles-mêmes avancé dans la voie des réformes : restructurations internes (réduction des frais généraux), arbitrage d’actifs entre opérations sur titres (obligations d’Etat) et concours à l’économie (en fonction de l’évolution de la demande de financement), diversification vers la banque de détail (financement des particuliers et des PME) censée dégager de plus fortes marges, redimensionnement des activités internationales vers l’Asie, notamment vers la Chine, développement de partenariat stratégiques… Si ces changements constituent un progrès, ils n’ont pas, pour l’instant, permis d’améliorer notablement la rentabilité des établissements.

Atténuation des facteurs de fragilité des banques

_ Les résultats annuels 2005 des principaux groupes bancaires japonais ont atteint un niveau cumulé record depuis la période de la bulle financière de la fin des années 80, à 3 122 milliards de yens au 31/03/2006 (contre 664 milliards de yens en 2004). Cette progression s’explique principalement par l’allègement des charges sur créances douteuses et les reprises de provisions. Les plus-values sur titres y ont également contribué, les gains sur actions excédant largement les moins-values supportées sur les portefeuilles obligataires du fait des tensions sur les taux d’intérêt.

_ Bien que le risque systémique qui pesait fortement sur le système bancaire japonais jusqu’en 2003 a aujourd’hui disparu, la situation d’ensemble n’apparaît pas complètement normalisée. Les banques demeurent confrontées à plusieurs problématiques : rentabilité insuffisante, mais également, bien que cela soit moins marqué qu’en 2004, encours significatif de créances compromises, notamment dans le secteur bancaire local, et fonds propres de base trop faibles.

Des difficultés pour développer la rentabilité

_ Débarrassées du poids des créances douteuses, les grandes banques japonaises s’efforcent de développer leur rentabilité, tout en affrontant une concurrence accrue qui se traduit par une compression des marges, déjà peu élevées dans un contexte où les taux d’intérêt restent faibles. Les plans stratégiques publiés font apparaître des efforts visant à développer les produits dégagés sous la forme de commissions (qui représentent 33,3 % du PNB en 2005 contre 30 % en 2004) et des stratégies commerciales vers des financements (crédits non garantis, immobilier…) et des clientèles (particuliers, PME) permettant de dégager de plus fortes marges. Cependant, la tendance structurelle à la désintermédiation bancaire observée depuis le milieu des années 90 se poursuit. Les entreprises continuent de se désendetter et d’assurer leur croissance par l’autofinancement ou le recours direct au marché. La reprise de l’encours global des prêts bancaires à l’économie observée depuis fin 2005 tient donc au développement des volumes sur certains segments d’activité plus risqués. Dans un contexte de concurrence exacerbé, en particulier sur les places locales, les marges dégagées par les banques japonaises demeurent faibles. Cette situation porteuse de risques pour la rentabilité globale du système bancaire est susceptible de perdurer en raison de la poursuite de la politique monétaire accommodante menée par la BoJ se caractérisant par des taux d’intérêt à court terme à un niveau proche de zéro.

Un volume de créances douteuses maîtrisé dans les grandes banques mais toujours excessif dans le secteur bancaire local

_ Les créances douteuses de l’ensemble des banques de dépôts s’élevaient à 19,5 milliers de milliards de yens au 31 mars 2006, en recul de 21 % par rapport à l’exercice précédent. Le taux de créances douteuses atteint 3,6 % (4,6 % au 31 mars 2005). Les grandes banques ont poursuivi leur effort d’apurement, leur taux de créances douteuses s’établissant à 1,8 % au 31 mars 2006. Les banques locales (établissements régionaux et coopératifs) continuent cependant de se situer en retrait de cette tendance, compte tenu de l’impact défavorable sur le tissu économique local qu’aurait une politique d’apurement volontariste des créances douteuses. Ces dernières concentrent 75 % de l’encours de créances compromises au 31/03/2006.

Fonds propres : dans l’attente d’une normalisation

_ Les grandes banques japonaises disposent de fonds propres qui leur permettent d’afficher des ratios de solvabilité nettement supérieurs au minimum réglementaire de 8 %, s’échelonnant, au 31/03/2006, de 10 % pour RESONA à 12,4 % pour SMFG. Cette capitalisation apparemment satisfaisante masque toutefois plusieurs facteurs de fragilité liés aux caractéristiques de leurs fonds propres, même si la situation d’ensemble s’est améliorée :
– les banques ont bénéficié en 1998, 1999 et 2003 d’injections de fonds publics en capital ou quasi-capital (remboursables) pour un montant global de 12 381 milliards de yens. Lors de l’exercice 2005, 1 762 milliards de yens ont été remboursés. A fin juillet 2006, MIZUHO, MUFG et Sumitomo avaient remboursé la totalité de leur fonds ;
– les actifs représentatifs de crédits d’impôts futurs éventuels (« impôts différés »), bien que globalement en diminution notable, représentent encore une fraction non négligeable des fonds propres de base (notamment chez SMFG). La question fait progressivement débat auprès des autorités japonaises : un plafonnement des « impôts différés » pourrait être envisagé comme aux Etats-Unis ;
– les fonds propres complémentaires comprennent des montants significatifs de provisions générales sur prêts et de plus-values latentes (sur titres et immobilisations corporelles), éléments par nature moins stables que du capital ou des emprunts subordonnés.

_ Ainsi, les ratios de solvabilité rapportés aux fonds propres de base, retraités des impôts différés et des dotations en fonds publics, font apparaître des marges de manœuvres assez étroites au 31 mars 2006 (au 31 décembre 2005, le Tier 1 de BNPP, de la Société Générale et du Crédit Agricole s’élevaient respectivement à 7,6 %, 7,6 % et 7,9 %). Le Tier 1 est négatif pour RESONA en raison de l’importance des fonds publics restant à rembourser.

Photographie : ©JNTO

Source : Mission économique du Japon – 08/06