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Calligraphie japonaise

Calligraphie Japon
Ce poème écrit en caractères chinois fut rédigé par l’empereur Saga à la mort du moine bouddhiste Saichō (最澄 (767–822))

L’étymologie du mot calligraphie provient du grec kálos (κάλος« beau ») et grapheîn (γραφεĩν, « écrire »). Associés, ces termes signifient « bien écrire ». Atteignant bientôt le rang d’Art, la calligraphie devient donc l’art de bien former les lettres ou, en Asie, l’art de bien former les caractères.

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L’origine chinoise de la calligraphie japonaise

Comme beaucoup d’arts japonais, la calligraphie japonaise (shodou – 書道) puise ses origines en Chine.

Les caractères chinois, dont les traits sont inspirés de l’observation de la nature, auraient été créé par le légendaire Cāng Jié (倉頡 ) vers 2650 av. J.-C. ou par le non moins légendaire auguste Fu Hsi. Le premier possédait 4 yeux et le second un corps de serpent.

D’un point de vue plus historique, l’écriture fait son apparition en Chine au IV siècle avant Jésus-Christ. C’est ainsi que la calligraphie fait son apparition et évolue au gré de l’écriture, des réformes administratives ou encore des inventions (création du pinceau, du papier et de l’encre).

Héritier de l’art calligraphique de Zhong Yao (151–230) puis de Wei Shuo (272–349), Wang Xijing (王羲之 (307-365)) fut, en se démarquant des canons officiels, l’un des premiers calligraphes, au sens artistique du terme.

Véhiculé par des moines bouddhistes zen, ce n’est qu’au VIème siècle que la calligraphie chinoise est introduite au Japon. Ce style originel de calligraphie chinoise porte le nom de karayō (唐様). Elle est encore pratiquée aujourd’hui au Japon.

Les premiers textes japonais calligraphiés

Calligraphie Sutra Japon
Sutra calligraphié du VIIIème siècle. Sutra dit « de la cause et de l’effet »

La plus ancienne calligraphie japonaise gravée date de 623. On la trouve sur la statue de Bhaisajyaguru (bouddha de la médecine) du temple Hōryū-ji (法隆寺) de la ville de Nara. Cette calligraphie est dite de style Shakeitai(写経体). Une autre calligraphie gravée, datant de 646, a été retrouvée sur le pont d’Uji.

On trouve trace des premières calligraphies japonaises écrites sur l’un des « commentaires annotés des trois Sûtra».

Les Sûtras sont des textes religieux bouddhistes.  Les « commentaires annotés des trois Sûtra» porte le nom de « Sangyōsho » (三経義疏). Ce recueil est composé de trois parties chacune annotant un sûtra particulier. Ainsi le « commentaire » nommé « Hokke Gisho » (法華義疏) annote le Sûtra du Lotus.  Cet ouvrage fut calligraphié en 615 et est considéré comme le plus vieux manuscrit japonais.

Le « Kongō Jōdaranikyō » (金剛場陀羅尼経) est un Sûtra japonais recopié par un moine japonais en 686. C’est la plus ancienne copie manuscrite calligraphiée existant au Japon. Elle est aujourd’hui conservée au musée national de Nara et a été classée comme trésor national.

Calligraphie Muso Soseki
Calligraphie de style soshô du maître Zen Musō Soseki (夢窓 疎石 (1275 – 1351)) signifiant « sans sens spirituel »

L’ensemble de ses premières calligraphies ont toutes un point commun, leur influence chinoise. Cette influence s’explique non seulement par le fait que la Chine soit le berceau d’origine de la calligraphie mais aussi par le fait que le Japon n’a pas encore développé son propre système d’écriture. La Japon utilise à cette époque uniquement les Kanji (漢字) chinois. Aussi développés soient-ils les Kanji ne sont pas complètement adaptés à la langue Japonaise. Les calligraphes japonais (shodoka) mettront des siècles avant de s’affranchir des divers canons et styles de calligraphies chinoises.

Vers une lente émancipation

A partir de l’ère Heian (794 à 1185 ap. J.-C.) le Japon tente de trouver sa propre voie. Au commencement de cette période l’ensemble de l’aristocratie et de la noblesse s’exerce à la calligraphie en recopiant textes et poésies chinoises. Même l’empereur Saga s’adonne à cet art avec un talent certain (嵯峨天皇 (786–842)). Les calligraphes chinois les plus appréciés sont alors et comme toujours Wang Xijing (王羲之 (307-365)), mais aussi Yan Zhenqing (颜真卿 709–785) et Ouyang Xun (歐陽詢 (557–641)).

Le Japon révèle à cette période d’excellent calligraphe comme les moines Kūkai (空海 774–835) et Saichō (最澄 (767–822)).

Les premiers germes de la future émancipation de la calligraphie Japonaise sont plantés avec la vulgarisation de l’écriture et l’évolution de l’alphabet. Avant le période Heian, les seuls kanji chinois étaient usités. Les Kanji ne reflétaient pas l’ensemble des prononciations possibles de la langue japonaise. Progressivement se construit donc un système syllabaire parallèle nommé kana.

C’est à partir de ce moment que se développe un style de calligraphie authentiquement japonais. Ce style est nommé « wayoshodo» (和様書道) ou plus simplement « wayō» (和様). Les meilleurs calligraphes (shodoka) de la période maîtrisant ce style sont Ono no Michikaze (小野の道風 (894–966)) le fondateur, Fujiwara no Sukemasa (藤原 佐理 (944–998)) et Fujiwara no Yukinari (藤原 行成 (972–1027)).

Le premier texte répertorié, calligraphié en kana, est un court poème (tanka – 短歌) écrit en 749.

La calligraphie Chinoise toujours présente

Durant l’ère de Kamakura (1185 à 1333 ap. J.-C.) puis celle de Muromachi (1333 à 1582 ap. J.-C.) le Japon est tourmenté par les guerres et les conflits. Le pouvoir politique et militaire échoit au Shôgun au détriment de l’empereur. Les arts, florissants en période de paix et sous la cour Heian, semblent perdre de leurs lustres.

Les échanges avec la Chine des Song sont néanmoins intenses. Le bouddhisme Zen, d’influence chinoise, rencontre un certain succès au Japon. De nombreux moines zen chinois se voient offrir la naturalisation. En même temps qu’ils s établissent sur l’archipel, ils propagent et renforcent un peut plus l’influence de la calligraphie chinoise.

Calligraphie poème Minamoto-no-Shigeyuki Japon
Double page extraaite du recueil de poésie Nishi-Hongaji xonservé à Kyoto. Poésie attribuée à Minamoto-no-Shigekuki

Trois grandes écoles Zen vont s’établir sur le sol japonais : l’école Sôtô (曹洞), Ôbaku (黃檗) et Rinzai (臨済). Cette dernière sera à l’origine d’un style nouveau de calligraphie, le style « Soshô». Le style « Soshô » est dérivé de la calligraphie « karayō » (唐様) d’origine chinoise. Moins technique, plus simple, ce style est supposé refléter la pensée Zen de cette école. Les calligraphes de ce style sont les moines bouddhistes zen Musō Soseki (夢窓 疎石 (1275 – 1351)), Shūhō Myōcho (1282-1337) et Ikkyū (一休宗純 1(394-1481)).

Le style japonais « wayô» (和様) ne disparaît pas pour autant durant cette période on retrouve ses champions avec Fujiwara no Shunzei (藤原 俊成1114 – 1204) et Fujiwara no Teika (1162 – 1241).

L’ère Edo (1603 à 1868 ap. J.-C.)

Durant cette période le Japon connaît une relative stabilité politique. Le pouvoir est entre les mains de la famille Tokugawa. Celle-ci met en place une politique isolationniste (Sakoku – 鎖国). Le Japon se ferme alors à toute influence extérieure. Durant  cette période chaque style de calligraphie campe sur ses positions et n’évolue guère. La calligraphie de style « Soshô » subsiste toujours.

L’étude de la calligraphie de style chinoise continue mais elle n’est plus alimentée par de nouveaux textes,… A l’instar de Hosoi Kotaku, les calligraphes de style chinois n’ont d’autre choix que de se plonger et de « redécouvrir » les classiques chinois des débuts.

Étonnamment le style japonais « wayō» (和様) ne profite pas de cette période pour augmenter le nombre de ses adeptes. Konoe Iehiro (近衛 家熈 1667-1736) en est l’un des ses rares représentants.

Calligraphie Sosei-Hoshi Japon
Reproduction d’une poésie de Sosei-Hoshi extraite du recueille Nishi-Honganji conservé à Kyoto

La seule véritable innovation de l’ère Edo est a attribué au calligraphe japonais Hon’ami Kōetsu (本阿弥 光悦 (1558-1637)). Celui-ci utilisa pour la première fois du papier avec des motifs peint à la main (fleurs de lotus, feuilles,…) pour y apposer ses calligraphies. Le dialogue peinture/calligraphie ouvrant ainsi un nouveau champ poétique jusqu’alors jamais tenté.

Hon’ami Kōetsu est considéré avec Konoe Nobutada (近衛 信尹 (1565-1614)) et Shōkadō Shōjō (松花堂昭乗 (1584-1639)) comme l’un des meilleurs calligraphes de son époque.

Sous l’ère Meiji (1868 à 1912 ap. J.-C.) l’ensemble des courants calligraphiques continue à  coexister paisiblement. Un nouveau style de calligraphie chinoise fait cependant son apparition. On doit l’apparition de ce nouveau style au calligraphe chinois Yang Shoujing (1839 1915). Son style fut popularisé au Japon au travers, notamment, des travaux du calligraphe japonais Iwaya Ichikuro.

De nos jours

La calligraphie est un art présent au quotidien au Japon. Des calligraphies sont aussi bien utilisées dans un cadre commercial pour faire la promotion d’un bien ou d’un service que lors de la cérémonie du thé.

L’ensemble des styles de calligraphie constitué au fils des siècles est encore activement pratiqué au Japon. La calligraphie s’étudie dès l’école primaire. Au collège la calligraphie constitue une des matières optionnelles de certains établissements. Des concours sont organisés chaque année dans la plupart des écoles du Japon. Les universités de Fukuoka, de Tōkyō Gakugei et de Tsukuba possèdent chacune un département de calligraphie.

D’un point de vue social la calligraphie revêt une grande importance. La maîtrise de la calligraphie est considérée comme un indicateur du niveau culturel et d’éducation d’un individu. Pour découvrir les outils du calligraphecliquez ici.