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Shinji Sômai

Shinji Somai
Shinji Sômai en tournage

Date de naissance : Né le 13 janvier 1948

Lieu de naissance : Morioka (province de Nambu)

Fonction : réalisateur

Flash :

Très peu connu en occident Shinji Sômai est pourtant l’un des grand maîtres du cinéma contemporain  japonais.

Du 12 décembre 2012 au 6 janvier 2013 la cinémathèque française a réparé cette injustice en lui rendant hommage au travers d’une rétrospective de 13 de ses plus grandes œuvres.

Biographie :

C’est à Sapporo et Kushiro que Sômai passe le plus clair de sa jeunesse, avant de gagner la capitale à l’âge de dix-neuf ans. Cinq ans plus tard, en 1972, il intègre les studios de la Nikkatsu, peu après la naissance des fameux roman porno : en d’autres termes, au moment où la plus ancienne des grandes compagnies de production se mue en boîte à images érotiques pour échapper au naufrage de toute une industrie, qui l’année précédente a déjà eu raison de la Daiei et menace de manière égale l’ensemble des majors.

Cette éducation cinématographique, notamment comme assistant-réalisateur du grand Chûsei Sone, est déterminante. Sômai lui-même lui paiera tribut en 1985 avec Love Hotel, bientôt désigné, parmi une liste des cent meilleurs « films pour adulte » du Japon, comme le premier d’entre eux. De fait, le roman porno aura été à la fois maléfice et bénédiction : maléfice, parce qu’il n’a pas sauvé le cinéma japonais du marasme tout en bridant, par son strict cahier des charges, la créativité de nombreux cinéastes ; bénédiction, parce qu’il a justement permis l’émergence d’une génération nouvelle, pressée d’en découdre, moins bégueule que d’autres aux ambitions plus nobles, portée en tout état de cause par une énergie réelle, d’ouvrir peut-être dans ce paysage sans perspective une voie nouvelle.

Love Hotel Shinji Somai
Film « Love Hotel » (1985) de Shinji Sômai

Dans la plaine dévastée du cinéma japonais des années 1980

Las, au moment où Sômai devient réalisateur (il a quitté la Nikkatsu en 1978), le paysage du cinéma japonais ressemble bien à la plaine post-apocalyptique de « Luminous Woman ».

Pareille table rase explique sans doute l’esthétique si particulière des films de Sômai, leur formidable appétit de formes, de personnages et de péripéties. Leur richesse thématique également, ou le brio avec lequel, tout au long des années 1980, ils agrègent à peu près tous les genres du cinéma, films d’époque exceptés, en en redéfinissant chaque fois les fondations, passant du film de yakuza (Sailor Suit and Machine Gun) au road-movie (P. P. Rider, Kazahana), du réalisme social le plus âpre (The Catch) au mélodrame (Last Chapter of Snow : Passion), jusqu’aux familles à jamais impossibles des années 1990 (Déménagement, The Friends, Wait and See).

Cette filmographie suit une ligne aux circonvolutions multiples, comme le signe d’une recherche d’abord empressée dans les années 1980, plus patiente au cours de la décennie suivante. Ou plutôt, comme autant de tentatives pour baliser un nouveau territoire. Sômai est l’étrange et tardif pionnier d’une cinématographie japonaise pourtant aussi ancienne que le cinéma lui-même. Celui à qui revient d’en redessiner les contours.

Le plan-séquence réinventé

Son outil le plus précieux : le plan-séquence, qu’il semble réinventer à chaque film. Il y a assurément du virtuose en lui. Chacun de ses plans passerait chez d’autres pour d’incroyables morceaux de bravoure : l’ouverture de Snake Eyes, celle de La Soif du mal, le finale de Profession : reporter, Sômai les a filmés sans bruit de nombreuses fois. De son propre aveu, cette sophistication presque outrancière du plan-séquence lui a d’abord été une pierre de touche dans la vaste entreprise de refondation à laquelle il se consacre dès son premier film (The Terrible Couple). En l’absence d’un sujet qui le satisfasse, repenser l’usage et l’implication de la caméra lui permet de s’extraire des torrents d’images que les années 1980 commencent de déverser.

Sômai de fait n’est pas seul, loin s’en faut. L’accompagnent des collaborateurs réguliers, souvent issus comme lui de l’écurie roman porno : le producteur Kei Ijichi, l’acteur Minori Terada, le scénariste Yôzô Tanaka (remarqué pour ses collaborations avec Masaru Konuma, Tatsumi Kumashiro ou Seijun Suzuki), et surtout tous ceux qui fondent avec lui, dès 1982, la Directors Company : Kazuhiko Hasegawa, Kiyoshi Kurosawa, Sôgo Ishii et quelques autres. Parmi les plus hauts faits d’armes de cette structure de production : Typhoon Club et ses collégiens reclus dans leur école un soir de typhon, grâce auquel Sômai accède à une juste reconnaissance internationale.

The Friends Shinji Somai
Film « the Friends » (1994) de Shinji Sômai

Un cinéaste de l’adolescence

Il n’est pas sûr que dans sa filmographie protéiforme, Typhoon Club puisse véritablement faire figure d’emblème : mais il n’est certainement pas étranger à l’idée d’un Sômai cinéaste de l’adolescence. Sailor Suit and Machine Gun, P. P. Rider, Déménagement, The Friends, d’autres encore : les personnages principaux de sept de ses treize longs métrages sont effectivement âgés d’une petite dizaine d’années.

Aussi Sômai est-il un cinéaste du risque, toujours près de faire le pas de trop, à la fois fragile et outrancier. Capable de ressusciter la précieuse vitalité qui alors fait défaut au monde du cinéma japonais dans son ensemble. Sa mort prématurée le 9 septembre 2001, à l’âge de 53 ans, en est peut-être la preuve, ou alors n’est-elle qu’une insupportable ironie.

Filmographie :

Kaza-hana (風花) : 2000

Wait and See (あ、春, Ah haru) : 1998

The Friends (夏の庭, Natsu no niwa) : 1994

Déménagement (お引越し, Ohikkoshi) : 1993

Tokyo Heaven (東京上空いらっしゃいませ, Tôkyô jôkû irasshaimase) : 1990

Luminous Woman (光る女, Hikaru onna) : 1987

Lost Chapter of Snow: Passion (雪の断章 情熱, Yuki no dansho – jonetsu) : 1985

Typhoon Club (台風クラブ, Taifû kurabu) : 1985

Love Hotel (ラブホテル, Rabu hoteru) : 1985

The Catch (魚影の群れ, Gyoei no mure) :  1983

P. P. Rider(ションベン・ライダー, Shonben raidâ) : 1983

Sailor Suit and Machine Gun (セーラー服と機関銃, Sêrâ-fuku to kikanjû) :  1981

The Terrible Couple (翔んだカップル, Tonda kappuru) : 1980

Source : Dossier de presse Cinémathèque Française – Biographie par Mathieu Capel