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Horus, prince du Soleil

L’histoire

Horus prince du soleil

Jeune garçon courageux, Horus a reçu l’épée de Soleil de Moog, le géant de roche, et a refusé le pacte que lui proposait le diable, Grunwald. Parti à la recherche de ses origines, il s’arrête en chemin, au village de Frep. Là, tout seul, il tue le grand brochet qui affamait le petit bourg en empêchant les poissons de remonter la rivière. Mais le héros n’a pas le temps de profiter de son nouveau statut qu’il doit déjà repousser la horde de loups envoyée par Grunwald, furieux. Le lendemain, en suivant la trace d’un chef de meute, un « loup argent », il rencontre une mystérieuse jeune fille égarée dans ses pensées, Hilda. Comme lui, elle a tout perdu, et cherche un sens à sa vie. Une belle amitié naît entre les deux jeunes gens mais, le Diable guette, fomentant dans l’ombre ses noirs desseins…

À propos de Horus, Prince du Soleil

Horus, Prince du Soleil, une oeuvre historique. Cette animation, mérite doublement cette appellation. Premièrement ce long-métrage le fruit de la première collaboration d’un ‘duo magique’ du cinéma d’animation japonais Isao Takahata (Le Tombeau des lucioles, Mes voisins les Yamada, séries TV Bouba le petit ourson, Heidi…) et Hayao Miyazaki (Le Voyage de Chihiro, Princesse Mononoke, Kiki la petite sorcière…).
HORUS Prince Du Soleil, c’est également un tournant décisif pour l’animation japonaise elle-même, pour la première fois  l’univers des seuls enfants est délaissé pour se tourner vers toutes les générations à travers un scénario élaboré et narrativement adulte.

Premiers pas

Horus prince du soleil

C’est en 1963 que débute la fabuleuse aventure de Horus, prince du Soleil. Cette année là, pendant la production de la série Ken l’Enfant Loup (la première incursion de la société Tôei Doga sur le marché de la télévision), Isao Takahata fit la rencontre qui allait changer la destinée de l’animation japonaise.

Tandis qu’il travaillait sur le show où il fit ses débuts de réalisateur (épisode 14), il collabora pour la première fois avec un certain Hayao Miyazaki, qui apprenait son métier en dessinant des intervalles.

La volonté et l’abnégation de son benjamin sautèrent immédiatement aux yeux de Isao Takahata. Cependant, c’est Yasuo Otsuka, un animateur déjà chevronné qui avait participé à toutes les productions animées du studio Tôei, qui saisit l’envergure du potentiel des deux artistes.

Les Mentors

Horus prince du soleil

Les travaux de Yasuo Otsuka servent de référence dans les écoles d’animation japonaises. Il a par ailleurs été directeur de l’animation sur toutes les premières réalisations majeures de Takahata et de Miyazaki (Horus, prince du Soleil, Panda Kopanda, Conan le fils du futur, Le Château de Cagliostro, Kie la petite peste, Sherlock Holmes). Grand pédagogue et exceptionnel découvreur de talents, c’est lui qui décida de concevoir un film dont le style et l’intrigue laisseraient de côté les enfantillages pour se construire autour d’un scénario complexe, cohérent, capable de divertir toutes les générations (par la suite, Hayao Miyazaki fera sien ce leitmotiv).

Quant à Yasuji Mori, il a intégré l’équipe de Horus, prince du Soleil, après la première interruption de la production. Très peu connu en France, au même titre que Yasuo Otsuka, Yasuji Mori a pourtant créé et standardisé, à lui tout seul, ce que l’on peut aujourd’hui nommer ²l’art de l’animation japonaise² !

Designer et animateur, il a rapidement compris qu’il serait efficace et agréable d’unifier l’esthétique globale d’un film d’animation. En faisant cela, il inventa des graphismes et une représentation du monde encore jamais vus.

Devant être considéré comme l’un des pères de l’animation japonaise moderne, Yasuji Mori a également nourri, en travaillant directement avec eux, le talent de plusieurs générations d’animateurs, tels que : Hayao Miyazaki, Yasuo Otsuka, Isao Takahata, Sadao Tsukioka, Kazuko Nakamura, Yusaku Sakamoto, Makoto Nagasawa, Seiichi Hayashi, Gisaburo Sugii, etc…

« Pour réaliser Horus nous avons bénéficié du soutien inestimable de plusieurs animateurs très expérimentés qui, bien avant nous, avec des salaires misérables et dans des conditions de travail éprouvantes, ont beaucoup fait progresser l’industrie de l’animation au Japon », précise Isao Takahata. « Des personnes comme Yasuo Otsuka et Yasuji Mori (auquel Hayao Miyazaki a consacré un livre entier) nous ont énormément appris. Ce savoir est encore aujourd’hui, pour nous, inestimable. Nous discutions de tout.  Sans ces aides précieuses nous n’aurions jamais pu saisir l’opportunité de réaliser Horus. Maintenant, le travail est plus corporatiste, l’expérience s’échange moins. Il est surtout question d’individualités. Or, sur Horus nous étions impliqués à tous les niveaux (production et narration) par la mise en valeur du travail du groupe ».

Rétrospectivement, on peut comprendre que, dans un contexte social difficile propice à la compétition, l’émulation unique ayant eu lieu sur Horus entre une jeune génération d’artistes doués et l’élite de la vieille garde, avait toutes les chances de produire des étincelles. Cela s’est traduit par la naissance d’une école de pensée œuvrant pour atteindre la qualité la plus élevée et la plus universelle en matière d’animation.

Contexte de production

Horus prince du soleil

A cette époque, le succès des séries télévisées s’élaborait au détriment de la popularité et de la qualité des longs-métrages, ce qui ne manqua pas de susciter de graves conflits entre certains animateurs et la direction de la Tôei.

« Horus, prince du Soleil, fut le projet grâce auquel nous souhaitions nous rebeller contre la production de l’époque », se souvient Isao Takahata. « Nous avons travaillé de toutes nos forces car nous ne connaissions pas l’ampleur de la tâche qui nous attendait. Mais c’était nécessaire pour espérer progresser et tester les limites du média au Japon. A l’époque, nous étions vraiment agressifs et véhéments. Peu importait la notoriété des artistes et des producteurs que nous critiquions, nous n’avions peur de rien. Aujourd’hui, les choses sont différentes, plus institutionnalisées, et les sociétés de production sont plus fragiles aussi. Cependant, nous étions vraiment prêts à tout pour faire triompher nos idées. Ce que nous avons accompli avec Horus c’est d’obtenir du réalisme au niveau des expressions et des interactions entre les personnages. Dans la scène de révolte, il n’est pas seulement question de villageois gesticulants, mais d’une foule unie agissant de concert. Rien de semblable n’avait été accompli au Japon auparavant. Nous avons prouvé aux japonais que l’on pouvait obtenir des expressions complexes avec des personnages dessinés ».

La révolution en marche

Horus prince du soleil

C’est dans ce contexte que le duo chaperonné par Otsuka, mit en chantier la production de Horus, prince du Soleil, un long-métrage de type « indépendant » (c’est à dire entièrement pensé et conçu par des artistes, non par des producteurs).

Le destin de cette bande devait être extraordinaire. Elle allait carrément faire sécession et marquer une date fatidique dans l’histoire du cinéma animé japonais en attestant de la viabilité artistique, si ce n’est économique, de spectacles aux ambitions élevées et s’adressant autant aux enfants qu’à une audience cultivée.

« Nous voulions donner naissance à une œuvre capable de nous plaire à nous, des adultes âgés d’une trentaine d’années », explique Isao Takahata. « Bien sûr, cela ne signifiait pas que le film ne s’adressait pas également à des spectateurs plus jeunes, bien au contraire. Malheureusement, il se trouve que Horus… fut un cuisant échec commercial. La promotion à l’attention du nouveau public des lycéens et des étudiants fut à l’époque très mal menée par la Tôei. Pourtant, le film ne laissa pas la firme indifférente, puisque la psychologie des personnages chez Tôei trouva un point de départ avec Horus. Beaucoup d’histoires mettant en scène des amours impossibles entre un homme et une femme issus de mondes différents furent produites par la suite. Les ressorts dramatiques que nous avions mis en place devaient être efficaces (rires) ».

Cependant, les trois trublions durent donc momentanément rabaisser le niveau de leurs ambitions, pour les recadrer au format du petit écran. Mais les germes semés par Horus, prince du Soleil ne s’arrêtèrent jamais de grandir, au point de s’épanouir sous les formes les plus surprenantes et les plus variées, dont Nausicaä de la Vallée du Vent et Princesse Mononoké sont les plus brillants aboutissements.

Le scénario

L’origine du scénario de Horus, prince du Soleil, remonte à la pièce de théâtre de Kazuo Fukazawa, qui s’inspirait elle-même énormément de l’aïnou yukar (une épopée légendaire).

« Contrairement à ce que peuvent penser beaucoup d’observateurs, c’est une pièce jouée dans les théâtres de marionnettes, Le Soleil de Tikisani (Tikisani no taiyô), qui est à l’origine de Horus, prince du Soleil », se souvient Kazuo Fukazawa. « Trois chansons sont les piliers du folklore traditionnel aïnou. Ce sont les récits narrant les exploits de Tikisani, d’Okikiurmi et d’Aynurallur, trois Dieux humanistes et compatissants. Ce sont à ces sources que j’ai puisé mon inspiration pour le scénario des Horus, prince du Soleil.

Le studio voulait que je rédige le scénario le plus amusant possible, puisque pour les patrons de la Tôei Horus, Prince du Soleil, devait impérativement être un dessin animé exclusivement destiné aux enfants. On m’a même forcé à écrire dans un bureau de la Tôei de manière à ce que je ne subisse pas d’influences extérieures.

Le jet du script qui en a résulté fut logiquement assez différent de ma première intention. Monsieur Takahata n’était pas du tout satisfait. D’autres membres du staff ont affirmé que lire le script était ennuyeux. Ils m’ont tous dit que ce scénario n’était pas ce à quoi ils s’attendaient et m’ont donc demandé d’en réécrire un autre plus semblable  à l’esprit de la pièce originale. Isao Takahata m’a alors montré son propre traitement du script, qui était en effet très proche du Soleil de Tikisani.

Je me suis donc remis au travail et j’ai notamment beaucoup révisé le personnage d’Hilda. J’ai en quelque sorte fait d’elle l’incarnation de l’héroïne du Chant d’amour Aïnou. Je voulais un personnage plus subtil. J’étais persuadé qu’Hilda était la clé de l’œuvre, et que si son personnage était intéressant, Horus, Prince du Soleil, le serait également.

Sous la direction d’Isao Takahata, le contexte initial a été modifié pour être mélangé avec celui des cultures orientales et nordiques. « L’histoire est inspirée d’un conte Aïnou », renchérit Isao Takahata. « A la base, il s’agit d’une animation de marionnettes. A l’époque, les producteurs nous firent remarquer qu’une œuvre consacrée à une ethnie n’était pas susceptible de conquérir une large audience. Comme nous avions une vision de l’Europe assez décalée, j’ai donc choisi de raconter cette histoire dans un contexte scandinave. »

La révolution initiée par Horus fut de représenter correctement le conflit psychologique opposant le bien, le mal et la vertu. A l’époque, éliminer presque totalement les « gimmicks » comiques et justifier systématiquement la présence de chaque élément graphique étaient franchement novateurs (les petits animaux ont bien été imposés aux schémas de Takahata par la Tôei pour faire plaisir aux enfants, mais le réalisateur en a fait l’incarnation du Moi et du Surmoi de l’héroïne, de manière à octroyer à ces bestioles un puissant rôle narratif).

Crédits

Titre : Horus, Prince du Soleil

Année de diffusion : 1968

Scénario : Kazuo Fuzakawa

Directeur de l’animation Yasuo Otsuka

Réalisation: Isao Takahata

Animateur clé, décors, conception : Hayao Miyazaki

Animateurs principaux : Reiko Otabe, Yoichi Otabe, Akemi Miyazaki

Chef décorateur : Mataji Urat

Décors : Masahiro Ioka

Mise en couleurs : Hiroko Kishimoto

Effets spéciaux : Chiaki Hirao

Directeurs de la photographie : Jiro Yoshimura, Yukio Katayama

Musique : Yoshio Mamiya

Mixage : Hiromi Oshihara

Effets sonores : Noriyoshi Ohira

Montage : Yutaka Chikura

Superviseur artistique chargé du scénario : Setsuyo Matoba

Dessin Animé : couleur

Source : dossier de presse Wild Side Vidéo